Chronique Juridique
04/03/2021

Par Maître Laëtitia ESTEBE

Avocat à la Cour

Voilà déjà une année écoulée sur fond de pandémie de Covid-19 et d’incertitude juridique entre les propriétaires de locaux commerciaux et leurs locataires.

Si des mesures gouvernementales d’urgence ont été prises (paralysie des sanctions, report des loyers), ces mesures d’exception n’ont pas répondu aux questions des parties en présence et de leurs avocats.

Cette période a vu éclore de nombreux contentieux sur la question même du principe du paiement des loyers, tant pour les entreprises qui ont vu leurs activités à l’arrêt, que pour celles dont les activités ont été partiellement touchées.

I / Etat des lieux des décisions de justice rendues entre bailleurs et locataires

Depuis le début de la crise sanitaire, la question de savoir si les commerces fermés administrativement doivent payer leurs loyers n’est pas clairement tranchée.

En 2020, sur la vingtaine de décisions rendues, la balance a penché en faveur des bailleurs. Les locataires n’ont pas obtenu de jugement les exonérant de régler leur loyer mais des invitations à la discussion et à l’adaptation des contrats (étalement, remise de loyers).

Depuis 2021, la tendance s’est très largement inversée en faveur des locataires. Information à tempérer toutefois, puisque les décisions rendues l’ont été en matière de référé, ou en matière d’exécution de jugement. Ces décisions peuvent donc être remises en cause.

Jusqu’au 25 février 2021, où le Tribunal Judiciaire de Paris vient de rendre une décision au fond : le bailleur a rempli son obligation de délivrance conforme du local et n’est pas tenu de garantir à son locataire “la chalandise des lieux loués” et la “stabilité du cadre normatif”... Le locataire, qui demandait la restitution des loyers payés pendant le 1er confinement, a été débouté.

II / La possibilité de réviser ses loyers dans l'après-crise, un espoir côté locataire ?

Cette décision du 25 février 2021 ne met pas totalement fin à l’espoir des locataires. Dans cette affaire, le locataire avait déjà payé son loyer et n’avait donc pas suspendu son obligation. Or, le mécanisme de l’exception d’inexécution qui était invoqué réside justement dans le fait de ne pas exécuter sa propre obligation, en défense face à l’inexécution de l’autre partie.

A côté de la voie judiciaire, il existe des moyens tirés du droit spécial des baux commerciaux, avec notamment la possibilité de réviser le loyer, en cas de variation de la valeur locative de plus de 10%.

En effet, une baisse des valeurs locatives est attendue, mais elle ne sera pas uniforme et son ampleur est encore méconnue.

Quoi qu’il en soit, bailleurs comme locataires devront être accompagnés par des professionnels du droit, les avocats du Barreau de Toulouse se tiennent à la disposition des justiciables.

 

FOCUS

A retenir : Pour les baux commerciaux en cours, la prudence reste de mise. Il est recommandé de s’engager dans la voie de la négociation, la bonne foi devant présider dans les échanges menés entre bailleur et locataire.

Pour les baux à venir, soyez vigilant dans la rédaction ! L’insertion de clauses spécifiques peut prévenir des questions aujourd’hui débattues devant les tribunaux : Force majeure, imprévision, obligation de renégociation, etc.

Le recours à un avocat est plus que recommandé dans la négociation de son bail, rappelant que ce contrat est le socle sur lequel est bâti l'entreprise, pour les commerces de proximité et ceux pour lesquels l’emplacement est primordial.

Article paru dans La Dépêche du Midi, Annonces légales

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