Compte-rendu du RDV du 23 avril 2020 avec Mme Belloubet

Sur le fonctionnement de la justice
 
Nous avons fait part de notre inquiétude de ne pas voir la justice figurer parmi les 17 chantiers prioritaires fixés par le gouvernement dans le plan de déconfinement. La ministre nous a indiqué que les annonces concernant la reprise des activités des tribunaux suivraient la présentation du plan de déconfinement gouvernemental fin avril.
 
Nous avons rappelé à la ministre qu’il était vital pour l’accès au droit et nos cabinets que cette reprise assure un égal accès à la justice sur le territoire national. Nous avons aussi précisé que nous attendions une annonce claire sur le sort réservé aux vacations judiciaires. Sur ces points, la ministre n’a pas souhaité s’engager clairement à ce stade.
 
La ministre a indiqué vouloir travailler avec la profession d’avocats sur la prolongation des dispositifs dérogatoires prévus par les ordonnances prises en application de la loi organique du 23 mars 2020. Cela concerne notamment les dispositions de procédures sans audience, ou d’audience de plaidoirie tenues en visio-conférence.
 
Nous demeurerons extrêmement vigilants sur le caractère nécessairement provisoire de ces aménagements qui ne doivent en aucun cas conduire à un amoindrissement des droits de la défense ou porter atteinte au principe du contradictoire.
 
Ce sujet sera à l’ordre du jour de l’assemblée générale du CNB du 15 mai qui devra décider de la position de la profession sur cette ces hypothèses encore mal définies.
 
Concernant les masques, nous avons rappelé qu’il appartenait à l’État d’assurer la sécurité sanitaire des avocats dans les enceintes des lieux de justice.
 
La ministre a proposé de permettre aux avocats d’accéder au marché prioritaire de l’État pour acquérir des masques de protection produits en France.
 
Sur les aides économiques à la profession
 

  • Avances au titre de l’aide juridictionnelle

La ministre a répondu favorablement à la proposition formulée par vos représentants de mettre en place un dispositif d’avances pour les avocats exerçant au titre de l’aide juridictionnelle. Ces avances seront distribuées par les CARPA. Elles seront destinées aux avocats assurant habituellement un nombre significatif de missions dans les dossiers aidés et dont l’activité est de ce fait fortement impactée par la suspension de l’activité judiciaire depuis le début du confinement.
 
La ministre s’est engagée à affecter 50 millions d’euros pour ces avances. Un projet nous sera communiqué sous peu par la Chancellerie et nous vous présenterons les détails et les conditions de ce plan d’avance. Cette aide devrait permettre d’offrir un répit en matière de trésorerie à beaucoup de Confrères.
 

  • Fonds de solidarité

Ainsi que nous l’avions demandé, la ministre nous a confirmé être intervenue dans la rédaction du décret du 16 avril modifiant les conditions d’éligibilité au fonds de solidarité pour les structures comportant plusieurs associés Ainsi le seuil de bénéfice annuel qui était de 60 000 euros par structure est porté à 60 000 euros par associé et conjoint collaborateur. C’était une demande forte de la profession afin que des cabinets qui justifiait de la perte de plus de moitié de leur chiffre d’affaires sur les mois de mars et avril 2020 soient éligibles aux deux volets de l’aide (1 500 euros mensuel et 5 000 euros) instituée par le fonds de solidarité des indépendants. Mais si le seuil de bénéfice ouvrant droit à l’aide est donc relevé pour les cabinets structurés (6 000 € x nombre d’associés, l’aide mensuelle reste limitée à un versement unique de 1 500 euros par cabinet quel que soit le nombre d’associés. L’accès à ces aides doit donc également tenir compte du nombre d’associés pour avoir un réel impact (1 500 € x nombre d’associés) comme cela semble être le cas pour les AARPI et associations d’avocats.
 
Par ailleurs et pour que la situation des cabinets ayant décidé de maintenir les rétrocessions de leurs collaborateurs soit prise en compte, il faut qu’une aide spécifique soit mise en place en faveur de ces cabinets lorsqu’ils auront constaté une baisse d’au moins 50% de leur chiffre d’affaires. Il conviendra également que la Chancellerie précise les modalités d’une aide de 1 500 euros versée aux jeunes avocats dont elle a fait l’annonce dans son communiqué.
 

  • Arrêt de travail pour garde d’enfants

La ministre nous a par ailleurs confirmé que les avocats libéraux, qui ne peuvent pas bénéficier du chômage partiel, pourront continuer à bénéficier, à titre dérogatoire, des indemnités journalières pour garde d’enfant après le déconfinement.
 

  • Caractère exécutoire des ordonnances de taxation d’honoraires

Afin d’accélérer les procédures de taxation d’honoraires comme l’avait souhaité la profession, la ministre nous a indiqué travailler sur une réforme permettant de ne plus rendre suspensif l’appel contre les décisions de taxation d’honoraires prononcées par les bâtonniers. Cette réforme permettra d’accélérer fortement le recouvrement des honoraires reconnus aux avocats par les décisions de taxation des bâtonniers et d’améliorer en conséquence la trésorerie des cabinets.
 
Tout ceci ne suffira pas à combler vos inquiétudes et attentes légitimes face à cette crise sans précédent, mais nous continuerons sans relâche à proposer et à sensibiliser les pouvoirs publics aux besoins spécifiques de notre profession.

Christiane Féral-Schuhl,
Présidente du Conseil national des barreaux

Hélène Fontaine,
Présidente de la Conférence des bâtonniers

Olivier Cousi,
Bâtonnier de Paris