Vent de panique sur les Management Package !

Rappelons-nous de l’effet papillon (par Edward Norton Lorenz, scientifique américain,1917-2008)...

Un battement d’ailes de papillon aux Urssaf d’Ile-de-France peut-il provoquer une tornade à la Cour d’appel de Paris (Cour d’appel de Paris, 6 juillet 2017, n°14/02741, Jurisdata 2017-014763) ?

Il semblerait que, pour les juges du second degré, il faille devoir répondre par l’affirmative.

En l’espèce, il s’agissait de permettre à six dirigeants de la SAS Groupe Lucien Barrière d’investir en capital concomitamment à l’entrée d’un fonds d’investissement, en souscrivant des bons de souscriptions d’actions (BSA) de la société.

Les BSA sont des véhicules juridiques d’intéressement permettant aux dirigeants de réaliser à la sortie du LBO - sous réserve de la réalisation de critères de performance - lors de la cession des actions sous-jacentes, une plus-value de cession.

Pour autant, ces bons sont depuis longtemps dans la tourmente.

Les BSA n'étant pas un outil spécifiquement destiné à l'intéressement des salariés au capital (contrairement aux mécanismes d’actions gratuites, notamment Article 80 quaterdecies du Code Général des Impôts, ou de BSPCE, article 163 G du Code Général des Impôts), l'administration fiscale tend, dans certaines circonstances, à requalifier en tout ou en partie le gain ainsi réalisé par les bénéficiaires de BSA et de le taxer non pas dans la catégorie des plus-values sur valeurs mobilières mais dans celle des traitements et salaires, beaucoup plus lourde fiscalement.

Un tel risque existe lorsque l'administration fiscale parvient à démontrer que les BSA ont été attribués aux bénéficiaires en leur qualité de salariés ou de dirigeants (et non en leur qualité d'investisseurs en capital) et que le gain provenant de la cession des BSA ou des actions sous-jacentes résulte directement de leur travail, considérant que seul celui-ci a contribué à la réalisation de la plus-value et non le risque et l’aléa économique liés à la détention en capital.

Les Cassandres du droit de la sécurité sociale considéraient – à raison – qu’au-delà du risque fiscal, ne pouvait être écarté le risque sur le terrain du recouvrement des charges sociales, et ont trouvé un écho favorable auprès des agents vérificateurs des Urssaf d’Ile-de-France, lesquels ont assujetti au cas d’espèce et sous le visa de l’article L. 242-1 du Code de la sécurité sociale, la totalité de la plus-value liée à la revente des BSA aux cotisations sociales.

Ce redressement a été contesté devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris puis devant la Cour d’appel de Paris, laquelle dans un jugement de confirmation, a jugé que l’attribution des BSA « constitue un avantage qui est fait en contrepartie ou à l'occasion d'un travail, et ne constitue pas seulement un investissement financier. Si les BSA représentent un investissement financier pour les dirigeants, lequel est soumis à des aléas et à des risques inhérents à l'activité, cela ne retire en rien l'existence d'un avantage réservé aux dirigeants dont seul le caractère bénéficiaire et l'importance de celui-ci généreront des cotisations. En conséquence, la plus-value réalisée lors de la cession constitue un avantage soumis à cotisations au sens de l’article L. 242-1 du Code de la sécurité sociale ».

Le raccourci opéré par la Cour dans sa motivation est fortement préjudiciable aux mécanismes d’intéressement et manque à l’évidence de rigueur dans sa construction. En effet, les magistrats auraient dû s’interroger, non pas sur le nombre restreint de bénéficiaires des BSA pour qualifier l’avantage, mais plutôt sur la nature même du risque supporté en capital par les bénéficiaires des BSA et savoir si le prix d'exercice des BSA qui leur était accordé était cohérent avec la valeur de marché de la société au jour de l'attribution (c’est-à-dire à la date de l’investissement) ou bien fixé à des conditions préférentielles.

De cette manière, si les BSA ont été payés à la valeur de marché, aucun avantage financier particulier ne devrait pouvoir être caractérisé, nonobstant le fait que la souscription ait été limitée à un nombre restreint de bénéficiaires.

La Cour de cassation épinglera-t-elle le papillon ?

... à suivre